Le rôle du conseil en période de crise

Le rôle du conseil en période de crise

Jacques Gillot-Péan –Mai 2021

 

 

 

 

Introduction

 

 

Le rôle du conseil en entreprise n’a plus besoin de se justifier, son utilité n’est plus remise en question ; par contre il doit prouver son apport opérationnel car son efficacité et son retour sur investissement sont en question notamment lorsque l’entreprise partenaire se voit confrontée à une crise.

Une crise peut arriver à tout moment au sein de n’importe quelle entreprise. Quelle que soit l’origine et la nature de la crise, les dirigeants exécutifs sont très sollicités et exposés. Face au temps qui bascule, à un avenir qui semble compromis ou du moins incertain, à une rupture du flux d’activité qui fragilise la pérennité économique ou financière, la tentation est grande pour le dirigeant de « parer au plus pressé », « d’écoper à tout va », de « tailler dans vif », de « sauver les meubles » donc de réduire drastiquement voire d’annuler les postes dits « de charge » comme la formation, la communication ou le conseil.

Est-ce une bonne stratégie ? Pour ce qui concerne l’activité de conseil, la réponse à cette question met en lumière la relation que le dirigeant a installée, installe ou souhaite installer avec son consultant et ses postures « réflexes » lorsqu’une crise advient.

Nous verrons également les différents rôles que peut jouer un consultant pour prévenir les crises prévisibles, pour manager une crise en cours puis en sortir « vivant » ou pour préparer l’entreprise à affronter les inévitables crises futures.

 

 

 

La crise et les postures du dirigeant

 

 

La crise est une rupture d’équilibre. Elle provient soit d’un événement imprévu qui provoque la sidération (mise en confinement brutale de toute l’activité suite à une pandémie), soit un événement prévu qui menace la survie de l’entreprise (déclenchement d’une grève dure et globale des équipes de production), soit d’un événement prévu ou non qui génère des conséquences internes comme externes (départ ou disparition d’une ressource clef ayant fait la réputation de l’entreprise).

 

Face à ces crises le dirigeant développe trois types de réflexes « classiques » plus ou moins « reptiliens » 

1- Lâcher la rampe, abandonner le combat, arrêter l’activité concernée, mettre en place un plan social, envisager le dépôt de bilan…

2- Se protéger en attendant que « l’orage passe », se replier, réduire la toile, courber l’échine et attendre ou espérer des jours meilleurs….

3- Affronter la crise, combattre les vents contraires, contre attaquer, se repositionner, réorienter l’activité…

 

Existe-t-il une bonne stratégie ? Tout dépend de la nature de la crise et de l’attitude du dirigeant face au risque. Toujours est-il que dans les réflexes de type 1 et 2 le conseil devient superfétatoire : il est soit suspendu (poste de charge) soit arrêté (comme l’activité de l’entreprise). Par contre, dans le réflexe de type 3, le rôle du conseil garde tout son sens pour aider le dirigeant à manager la crise au plus près de l’événement, pour anticiper une future crise de nature similaire et pour organiser une veille permanente dans la prévention des crises. Dans cette dernière optique le conseil n’est pas vécu comme un coût mais comme un investissement.

 

 

 

Le rôle du conseil pour prévenir les crises prévisibles

 

 

Le conseil est un « organe » de réflexion et de questionnement. Il n’attend pas que telle action provoque tels effets positifs ou négatifs. Il agit en amont : il challenge les différentes orientations développées par l’équipe de direction, il vérifie auprès de l’encadrement intermédiaire sa capacité à comprendre, intégrer et porter les choix stratégiques auprès de leurs collaborateurs, il teste l’opérationnalité des actions à mettre en œuvre avec les équipes du terrain.

 

Ce rôle du conseil doit permettre au dirigeant de prévenir la survenance d’une crise par l’analyse régulière de son modèle économique, de sa stratégie de développement ou de la pertinence des plans d’action. Il intervient sur le long terme de l’organisation

 

 

Le rôle du conseil pour manager la crise et en sortir « vivant »

 

Malgré toutes les préventions et anticipations possibles une crise peut toujours advenir. Le rôle du conseil vise alors le court terme , la tactique de la réaction et non plus le long terme , la stratégie de l’action. Cette démarche s’articule autour de quatre axes essentiels :

1- Contenir les dommages en clarifiant le décryptage de la crise. Pour le conseil, il est important durant cette phase de prendre en compte l’éventuel déni de la situation par le dirigeant qui, parfois, minimise l’ampleur de la crise : cette posture peut générer une perte de confiance de l’équipe d’encadrement (cheville ouvrière de la gestion de crise), un rallongement de la durée de la crise voire une complexification de la sortie de crise.

2- Éteindre le feu par le déploiement d’un plan de communication dédié : il faut reprendre au plus vite le contrôle de l’histoire en interne comme en externe afin de restaurer la confiance autour du projet d’avenir.

3- Sortir de la crise au plus vite par le suivi de l’activité et la mise en place d’indicateurs clef de performance. Ces indicateurs servent à piloter le retour à une situation normale et quitter le mode de gestion de crise.

4- Jouer un effet miroir, apporter une vision nouvelle voire décalée, amener le dirigeant à sortir de son cadre de référence habituel pour envisager l’ensemble des scenarii possibles sans a priori ni présupposés.

 

Quelle que soit la nature de la crise  (exceptée celle qui conduit à l’arrêt pur et simple de l’activité), il est essentiel de conserver une qualité des prestations (production, commercialisation, service) afin de ne pas ajouter au désordre ambiant la désaffection des clients et de l’ensemble des partenaires. La bonne conduite des affaires facilite la sortie de crise.

 

 

 

Le rôle du conseil pour préparer l’entreprise à affronter les inévitables crises futures

 

 

Toute entreprise peut être un jour touchée par une crise. Il est donc nécessaire de se préparer à l’éventualité d’y être confronté. A ce stade le rôle du conseil porte sur quatre points principaux à construire en étroite coopération avec l’équipe de direction rapprochée :

 

Tout au long de sa carrière le dirigeant conduit trois ou quatre combats complexes et décisifs (fusion, crise lourde, restructuration,…) ; le conseil, lui(s’i s’agit réellement d’un professionnel), aura accompagné de multiples situations de ce genre. Ce qui fait sa valeur ajoutée et sa pertinence c’est sa courbe d’expérience, il est un spécialiste de la gestion des conflits, sa vie quotidienne, c’est « la guerre ».

Dans ce cadre, la rémunération du conseil est indispensable, elle évite toute relation équivoque. Le dirigeant reste libre, ne doit rien à son conseil, ni reconnaissance ni fidélité.

 

 

 

Conclusion

 

 

Le rôle du conseil en situation de crise suppose un contexte favorable basé sur une relation de confiance et d’estime entre le dirigeant et son consultant. Elle doit dépasser la simple relation commerciale de client à prestataire qui régit trop souvent le « contrat » du conseiller.

Combien de fois avons-nous entendu un dirigeant vilipender l’activité de conseil. Ce n’est un mystère pour personne que les dirigeants de PME se méfient des consultants. En « vitesse de croisière » dans la vie de l’entreprise la relation entre le dirigeant et son conseil s’apparente souvent  à une relation de prestataire de services où l’un vit à coté de l’autre avec plus ou moins de respect mais sans réel « investissement » dans la relation.

Par contre, dans les situations de crise le rôle du conseil n’est plus de l’ordre de la prestation mais de celui du partenariat, ou alors il n’existe pas. La principale difficulté ne réside pas dans les aspects techniques pour aborder et gérer cette phase dangereuse de la vie d’une entreprise mais plutôt dans la qualité de la relation avec le dirigeant. La présence « forte » du conseiller dans l’entreprise lors de la gestion d’une crise ne remet pas en cause la légitimité du dirigeant ni ne sape son autorité. Elle permet tout simplement d’acquérir les compétences idoines, de partager les moments de stress et de tensions pour mieux les « digérer » et de vivre ensemble un événement somme toute fédérateur pour l’entreprise.

La crise devient une opportunité de « rebattre les cartes » d’avoir un regard neuf sur les évènements et les choix à opérer.

 

 

 

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