Jacques Gillot-Péan 2022
Introduction
Le management est une fonction ; elle se décline autour de cinq caractéristiques bien établies :
- Définir des objectifs clairs, pertinents et partagés au niveau collectif et/ou au niveau individuel
- Organiser le travail dans son unité en clarifiant le « qui fait quoi »
- Mettre en place un système d’information régulier et interactif
- Développer les compétences de ses collaborateurs par des actions de formation et d’accompagnement
- Piloter et suivre les activités et les résultats de son unité.
Selon le champ d’application du management (stratégique, intermédiaire ou de proximité), les indicateurs de succès diffèrent.
Le leadership est un ensemble de postures, attitudes et comportements ; il s’organise autour de sept piliers essentiels :
- Savoir combiner des faits, concepts et images pour donner du sens à une action ou un projet
- Faire sentir aux autres qu’on comprend leurs « problématiques » et qu’on les intègre dans sa réflexion
- Créer une ambiance de travail dynamique où chacun peut canaliser son énergie
- S’exprimer de façon compréhensible pour informer, persuader ou arbitrer
- Savoir jouer un rôle de médiateur face aux différents types de conflits qui peuvent advenir
- Inspirer confiance non par des déclarations d’intention mais par des marques tangibles d’intégrité et de détermination
- Varier ses stratégies pour pouvoir surprendre car des habitudes connues de tous sont limitatives.
On voit bien que le management appartient au monde du rationnel et le leadership à celui du relationnel. Mais alors, quel monde héberge le pouvoir et l’influence au sein d’une organisation ? Qui entre le manager et le leader détient les clés de l’influence ? Peut-on imaginer une fonction managériale réussie sans leadership et, inversement, une posture de leader efficace sans l’exercice du management ?
Le leadership sans management
Le rôle de leader n’est pas forcément lié à un statut officiel. En effet, être leader signifie exercer une influence sur les autres : il ne s’agit pas d’une qualité inhérente à un manager car n’importe quelle personne peut la posséder. Le leader a le courage de ses convictions et entraine tous ceux qui le reconnaissent. Le leader peut, parfois, inspirer une crainte mêlée de fascination et de dévouement mais il fait avancer les hommes.
Une organisation a besoin de leader pour relayer son ambition et permettre aux membres de cette organisation de trouver un niveau de satisfaction suffisant et, ainsi, les aider à investir leurs énergies. Pour ce faire, le leadership assure des fonctions indispensables pour un groupe :
- Fournir une vision prospective: un leader reçoit son autorité d’un groupe parce qu’il le sort d’une vision à court terme pour entrer dans des perspectives ou des projets à plus long terme.
- Donner une signification aux évènements : les membres d’un groupe ont besoin de trouver un sens à leur existence et la personne qui apporte des réponses à ce besoin acquiert la posture de leader.
- Assurer une régulation dans les moments de turbulence: face aux interrogations, aux incertitudes, aux divergences le leader prend des initiatives, conseille ou arbitre et ce faisant fournit l’inspiration et la stimulation nécessaires pour surmonter ces moments délicats.
Toutefois, un leader sans légitimité institutionnelle peut devenir « improductif » dans la mesure où son influence se disperse ou se dilue lorsqu’elle n’est pas confirmée ou confortée par une fonction. Par ailleurs, un leadership sans légitimité institutionnelle peut exercer un contre-pouvoir et « lever les troupes » contre l’entreprise : son charisme qui constitue la base de son influence peut galvaniser les personnes et s’opposer au pouvoir du manager.
Le management sans leadership
La fonction de manager est forcément liée à un statut officiel. En effet, le manager est mandaté par une entreprise qui se développe et se structure pour l’aider à réaliser ce qui doit être réalisé par les différents acteurs de cette entreprise. Pour ce faire le manager exerce un ensemble d’activités incontournables :
- Déterminer et faire vivre un plan d’action: le manager fixe les étapes détaillées et les calendriers pour parvenir aux résultats attendus ; il attribue les ressources nécessaires pour que les choses se réalisent.
- Organiser le travail au sein de l’unité : le manager met en place les structures et les délégations pour exécuter le plan d’action ; il fournit les méthodes et procédures pour faciliter la réalisation des actions.
- Suivre et contrôler les résultats: le manager fait l’examen détaillé des réalisations, analyse les écarts au regard du plan d’action, résout les problèmes et propose en permanence des améliorations.
Toutefois, un manager sans leadership peut devenir une « mécanique froide », voire un arbitraire dangereux. Le pouvoir qui justifie son influence confère à celui qui en use le droit de commander ou de se faire obéir. Mais s’il se met au seul service de la règle, de la contrainte et de l’imposition, alors la méfiance, voire la peur, prend le pas sur la confiance ; l’énergie des acteurs se mobilise pour se défendre plutôt que pour créer, les personnes se figent ou deviennent agressives.
Le terrain de l’influence
Contrairement à la manipulation qui consiste à manœuvrer de manière directe, souvent à sens unique, afin d’arriver à ses fins, l’influence repose sur une démarche sincère et constructive. Pour l’exercer de façon éthique, il faut avoir pleinement conscience des éléments entrant en jeu dans une relation avec une équipe ou un interlocuteur.
Deux éléments essentiels dessinent le terrain de l’influence :
- La légitimité : elle passe par l’expertise acquise au travers de l’expérience ainsi que par les compétences techniques et humaines. Sans cette légitimité le manager aura des difficultés à convaincre ses différents partenaires du bien fondé d’un projet ou d’une proposition innovante : nous sommes bien là sur le champ du management
- Le pouvoir des émotions : l’intelligence émotionnelle est l’une des caractéristiques des grands leaders. Elle offre en effet des clefs que l’intellect ne peut fournir. Une intelligence cognitive développée permet d’identifier ses émotions, de les maîtriser et, ainsi, de les utiliser de façon positive pour influencer et convaincre : nous sommes bien là sur le champ du leadership.
À ces deux piliers de l’influence, il faut ajouter la maîtrise de la communication aussi bien pour le manager que pour le leader. Asseoir son influence nécessite (pour l’un comme pour l’autre) de connaître et de maîtriser les codes d’une communication « efficace » reposant aussi bien sur les mécanismes verbaux que non verbaux. L’adhésion au projet porté par le manager comme le leader ne se fera pas sans une compréhension préalable ; une communication non maîtrisée provoque des quiproquos, des malentendus ou des « dialogues de sourd » facteurs de résistance ou d’opposition.
Conclusion
Sans la légitimité de l’autorité du manager organisation peut rencontrer des difficultés pour remplir sa mission. Toutefois, il est « naturel » que certaines personnes ou certains groupes cherchent à s’opposer aux autorités officiellement mises en place voire tentent de se substituer à ces autorités. C’est pourquoi le management seul peut être empêché s’il n’est pas accompagné du leadership.
Le pouvoir d’influence est considéré comme légitime lorsque que les personnes reconnaissent à celui ou à celle qui l’exerce le droit de commander autrement dit lorsque que les personnes reconnaissent son leadership. Dans le cas contraire, le pouvoir d’influence reste un attribut sans efficacité dans la mesure où son titulaire s’expose à la contestation plutôt qu’à l’acceptation.
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