Le rôle de la communauté humaine dans la planification stratégique

Le rôle de la communauté humaine dans la planification stratégique

Jacques Gillot-Péan 2024

 

 

 

 

 

 

Introduction

 

 

La formalisation d’un support de planification stratégique ne pose, en tant que telle, aucun problème. Que ce dossier prenne le nom d’un « Projet d’Entreprise », d’un « Plan d’Orientation Stratégique » (P.O.S.) ou d’un « Plan à Moyen Terme » (P.M.T.), la question se règle facilement dans la mesure où le dirigeant (avec l’aide ou non de son équipe de direction et/ou d’un conseil externe) dispose des études préalables, maîtrise une démarche méthodologique rigoureuse et connaît les règles de l’expression écrite inhérente à ce type de dossier.

 

Le véritable problème est celui de la compréhension, de l’adhésion et de l’implication des différents acteurs autour de la pensée stratégique du dirigeant.

Autant le partage total de la pensée ou de la décision stratégique reste illusoire (les projets d’entreprise résultant d’une démarche d’élaboration collective, remplis de bons sentiments, de compromis démagogiques sont inopérants. Ils n’ont de stratégique que le nom et finissent, généralement, dans la poussière des tiroirs) autant la planification stratégique ne peut pas se faire « en chambre » : l’échange et le débat permettent d’enrichir, d’amender et de compléter la vision d’une personne, la quantification des objectifs et des indicateurs implique tout l’encadrement, la description des lignes d’action demande l’appui des spécialistes et des réalisateurs,

 

Autrement dit, la mobilisation de la communauté humaine doit être envisagée pour fiabiliser le processus de planification stratégique et ce, lors de trois phases essentielles :

 

 

 

La mobilisation lors de la phase de conception

 

 

Pour cette phase de conception, de nombreux dispositifs existent. Toutefois, trois modalités fréquemment utilisées méritent d’être signalées :

 

  1. Le questionnaire d’enquête : il est, en général, utilisé lors de la préparation de l’élaboration d’un projet d’entreprise. Il comprend de 50 à 80 questions classées en grandes rubriques permettant d’identifier les aspects primordiaux auxquels le projet d’entreprise doit répondre, le climat et la dynamique motivationnelles des collaborateurs, les inquiétudes face au projet, les changements attendus ainsi que les éléments qui constituent le socle culturel de l’entreprise.

Ce dispositif d’enquête qui présente d’indéniables avantages, reste néanmoins, lourd et onéreux. Il conduit souvent à la déception (« tout ça pour ça »).

 

  1. Les groupes de travail : ils sont constitués, en général, d’un échantillon représentatif des différents métiers de l’entreprise. Sous la conduite d’un animateur externe et à la lumière d’un document d’orientation, les groupes de travail doivent élaborer une proposition simplifiée de projet ou de plan. Sur la base de ces travaux, l’équipe de direction formalise une synthèse plus ou moins fidèle, plus ou moins enrichie qui deviendra le projet d’entreprise.

Cette modalité très féconde notamment pour ressouder les différentes strates hiérarchiques ou décloisonner, ne permet pas souvent, au niveau du contenu, d’accoucher d’une stratégie précise ou innovante.

 

  1. Les groupes chargés de l’élaboration des plans d’action annuels : constitués pour chacun d’eux, en général, de l’encadrement d’une même direction (avec, éventuellement, un « candide »), ils interviennent à la fin du processus d’élaboration stratégique. Leur rôle est d’assurer la déclinaison opérationnelle de la pensée stratégique, de lui donner un contenu concret et opératoire.

Cette méthode apparaît vertueuse dans tous les cas. Si elle ne présente rien de très créatif, elle permet à chaque manager de définir, avec son équipe, les objectifs et les plans d’action de son unité à la lumière des orientations déterminées par l’équipe de direction.

 

 

 

La mobilisation lors de la phase de communication

 

 

La communication d’un projet ou d’un plan d’entreprise peut reposer sur des dispositifs différents et combinés. De plus, une communication ciblée peut être envisagée pour des acteurs externes et internes spécifiques (Conseil d’Administration, Comité d’Entreprise, presse, clients, …).

Pour aller à l’essentiel, citons trois méthodes directement centrées sur la mobilisation du corps social de l’entreprise :

 

  1. La convention d’entreprise : elle réunit l’ensemble des collaborateurs lors d’une « grande messe » plus ou moins festive. Au-delà de la présentation du plan stratégique, il s’agit de créer un événement facteur de cohésion. La convention d’entreprise qui peut générer de nombreux écueils n’est efficace qu’aux conditions suivantes :

 

  1. La convention des managers : Elle réunit, comme son nom l’indique, l’ensemble de l’encadrement. Ce dispositif essentiel doit être organisé systématiquement tous les trois ans (a minima), lors de la présentation d’un nouveau projet ou d’un nouveau plan :

La convention des managers doit être organisée dans un souci de participation active (questions-réponses, ateliers, tables rondes, …)

 

  1. La démultiplication par l’encadrement : elle consiste en général, à l’issue de la convention précédente, à demander à chaque manager de réunir son équipe pour lui présenter (à l’aide d’un kit de démultiplication) les choix stratégiques, les objectifs à 3 ans et les leviers d’action de l’entreprise. Pour être efficace trois conditions s’avèrent nécessaires :

 

Ces trois modalités peuvent être associées et combinées dans le cadre d’un plan de communication structuré. Dans tous les cas, il s’agit de respecter le principe de cohérence entre le medium (moyen de communication) et le message (contenu stratégique) pour éviter que le medium devienne le message (ou plus important que lui).

 

 

 

La mobilisation lors de la phase de mise en œuvre

 

 

Pour éviter le syndrome « du soufflé » qui guette tous les plans d’entreprise (« sitôt diffusé, sitôt oublié ») des modalités de mobilisation doivent être envisagées tout au long de la vie d’une planification stratégique :

 

  1. Le bilan semestriel ou annuel : il consiste à :

 

Ce bilan peut être l’apanage de la seule équipe de direction ou, au contraire, reposer sur un dispositif de reporting « remontant ». Qu’importe, il s’agit de suivre, de communiquer, de mobiliser, de témoigner de sa rigueur et de sa ténacité. La pensée stratégique sans mise en œuvre et suivi opérationnel est sans effet, quelle que soit sa puissance, sa pertinence et sa beauté.

 

  1. La remise à jour annuelle du plan stratégique : elle consiste à amener chaque responsable de département ou d’unité à définir des objectifs annuels et des plans d’action opérationnels. Rappelons que les leviers d’action à 3 ans du plan stratégique ne sont pas des plans d’action à 3 ans (ce serait une errance, une illusion et une injure faite à l’avenir).

Chaque année, à la lumière des résultats obtenus, des évolutions structurelles et conjoncturelles, un process managérial doit conduire à une planification annuelle inspirée par une réflexion stratégique pluri annuelle.

 

  1. Le bilan global à 3 ans : il consiste à confronter sa vision stratégique à la réalité d’un constat, trois ans après. Cette confrontation est souvent cruelle : le monde a changé, la vision date, les réalisations ne sont pas toutes au rendez-vous, les objectifs ne sont pas forcément atteints. Bref, la prévision n’est pas une prédiction, la vie est pleine de surprises, bonnes ou mauvaises.

Qu’importe, constater des écarts ne rend pas caduque la planification stratégique, bien au contraire :

 

 

 

 

 

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