La recommandation, une arme de prospection massive

La recommandation, une arme de prospection massive

Jacques Gillot-Péan 2024

 

 

 

 

Introduction

 

 

Alors que tout le monde (des managers commerciaux aux chargés de clientèle) s’accorde à reconnaître que la recommandation pro-active est, sans l’ombre d’un doute, la démarche la plus efficace pour réussir une prospection commerciale, elle demeure encore peu utilisée par les acteurs. Alors que les résultats obtenus par la prospection par recommandation sont sans appel (80% des tentatives de recommandation réalisées de façon maîtrisée aboutissent à une prescription qualifiée) beaucoup doutent encore de sa pertinence ou de son efficacité. Alors que le « coût » de la prospection par recommandation est quasiment nul (la demande d’une information et d’une autorisation prend, au maximum, trois minutes dans le cadre d’un entretien commercial) cette démarche reste remisée en fin de liste des opérations nombreuses envisagées pour les stratégies de conquête d’une nouvelle clientèle.

Comment expliquer ce paradoxe ? Existe-t-il une incompréhension voire un malentendu sur le sens même de ce qu’est une recommandation pro-active ? Les approches proposées s’avèrent-elles trop complexes et par conséquent contre productives ? Nos valeurs et croyances dans la représentation qu’on se fait de la recommandation (peur de déranger, de se trouver dans une position de demandeur, de « salir » la relation avec son client, …) limitent-elles notre confiance ou bloquent-elles notre volonté ?

 

À la lumière d’études récentes, 80% des clients se déclarent prêts pour recommander une entreprise dont ils sont satisfaits. En revanche, seulement 8% des commerciaux se disent prêts à développer une démarche systématique de demande de prescription auprès de leurs bons clients. Aussi, oser demander une recommandation suppose, pour franchir ce « blocage » :

Un terrain de jeu clair :

 

La prospection est un impératif dans l’exercice du métier de chargé de clientèle à la fois pour fidéliser sa clientèle privilégiée dans une logique défensive (un client prescripteur reste plus souvent fidèle dans la mesure où il doit se montrer cohérent avec lui-même) et aussi pour renouveler son portefeuille clients par la conquête de prospects ciblés et recommandés (et ainsi se simplifier la vie).

Afin de répondre à cet impératif, le commercial doit, tout d’abord, clarifier le terrain de jeu en résolvant trois problématiques essentielles :

 

1/ La problématique de la cible : la recommandation n’est pas une action de parrainage assorti de « cadeaux » ou de prescription sur un réseau rémunéré, c’est une activité en tant que telle qui porte exclusivement sur des clients « haut de gamme » de son portefeuille : autrement dit des clients avec lesquels on a eu l’occasion de réaliser à plusieurs reprises des opérations réussies.

2/ La problématique du moment : la recommandation ne s’improvise pas. Elle fait partie d’un des temps de la conclusion d’un entretien commercial structuré (après la concrétisation et avant la prise de congé). C’est prendre un risque inutile que de vouloir tenter une demande de recommandation à tout autre moment (un bon ingrédient placé au mauvais moment peut faire louper la recette).

3/ La problématique de la relation : la recommandation n’est pas une vente supplémentaire mais un échange d’informations. La demande doit s’inscrire dans le cadre d’une conversation naturelle avec un partenaire (juste avant de se quitter). Il n’est pas nécessaire d’avoir une relation « ancienne » avec un client pour tenter la recommandation. Au contraire, elle connaît un taux de succès plus important dans la première année de la relation.

 

 

 

Un synopsis « millimétrique »

 

 

Une fois le cadre clairement posé et respecté, il s’agit de réaliser cette activité précise qu’est la demande de recommandation pro-active. C’est court (deux à trois minutes maximum), ça semble simple quand on l’observe et, pour autant, de nombreux échecs adviennent faute de maîtrise technique. C’est un peu comme le service au tennis : c’est court, ça semble facile et, pour autant, c’est l’enchaînement rigoureux d’un ensemble de gestes techniques précis et souvent répétés qui évitent d’envoyer la balle dans le filet ou au-delà du court.

 

Pour la demande de recommandation pro-active, le synopsis repose sur l’enchainement rigoureux de cinq temps qui comportent chacun un effet « cliquet » et une possibilité de sortie « honorable » si la réponse n’est pas celle attendue :

1/ Vérifier la satisfaction du client : choisir un client avec qui on fait de bonnes affaires et avec qui on s’entend bien est une condition préalable. Toutefois si la première partie de la condition est factuelle donc assurée, la seconde reste une perception qu’il faut vérifier (on peut s’illusionner sur sa relation à l’autre).

« Madame, Monsieur, cela fait deux ans que nous travaillons ensemble. Ça m’intéresse d’avoir votre sentiment sur la façon dont nous fonctionnons » : si la réponse est « chaude », avancer dans le synopsis, si la réponse est « tiède » traiter la réaction et avancer (éventuellement), si la réponse est « froide » comprendre les raisons et arrêter le synopsis.

2/ Initier la recommandation : il s’agit d’obtenir un accord de principe qui porte sur son établissement et non sur soi directement et de ne pas cibler une personne en particulier)

« À ce propos, seriez-vous prêt, sur le principe, à recommander notre établissement auprès de votre entourage » : s’il existe un accord sur le principe, continuer le synopsis, sinon en parler, accepter la position de principe du client et arrêter le synopsis.

3/ Renforcer la recommandation : il, s’agit d’obtenir un nom (et non des noms) avec les informations de contacts nécessaires.

« Justement, pensez-vous à quelqu’un en particulier que je pourrais appeler de votre part » : si « oui », prendre les informations d’accessibilité, si hésitation, renforcer par une question similaire mais sans forcing, si « non » , comprendre, remercier et arrêter le synopsis.

4/ Boucler la recommandation : il s’agit d’obtenir une introduction, autrement dit l’autorisation d’appeler la personne au nom du client (c’est en cela où la recommandation est pro-active et complète).

« Merci pour cette information. Pouvez-vous prévenir votre interlocuteur de ma démarche pour qu’il ne soit pas surpris ? Ensuite, Je me permettrai d’appeler cette personne de votre part » (laisser un silence après cette affirmation) : si « pas de problème », terminer le synopsis, si « non », comprendre, traiter l’objection, remercier pour l’information et arrêter le synopsis.

5/ Garantir la confidentialité : il s’agit de préciser quels seront les modalités des retours d’information et de rappeler les règles déontologiques.

« J’aurais l’occasion de vous informer des résultats de ce contact. Bien entendu, si nous devions travailler avec cette personne la confidentialité serait respectée » : cette double garantie est nécessaire pour transformer, à terme, le client en « ambassadeur » de l’entreprise via la recommandation.

 

 

 

Une posture « adulte »

 

 

Pour réussir une demande de recommandation, il faut, enfin, développer sa confiance en soi.

Régulièrement des clients satisfaits n’hésitent pas à nous recommander « naturellement » tel ou tel proche. Lors de certains entretiens, le commercial peut être amené à évoquer des solutions ou des conseils pour répondre au problème d’un « proche » de son client.

 

La prospection par recommandation s’inspire largement de ce constat pour l’étendre et la formaliser de manière à maîtriser et à organiser ce qui auparavant pouvait être interprété comme un « plus » relationnel. Tout bon chargé de clientèle a une utilité reconnue par un grand nombre de ses clients. S’il est lui-même convaincu de son utilité, une recherche de recommandation ne correspond plus à une « demande », une contrainte exercée sur un client, mais à une opportunité de faire bénéficier l’un de ses proches d’un service dont la qualité est reconnue.

 

 

 

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